Block 108 bis : 20


 


 

20 :


 


 


 

« - Attention tout le monde ! On va se poser ! » annonce Horst depuis le poste de pilotage tandis que Gena est à la manœuvre.


 

Sidonie quitte ses écouteurs, Moïse se réveille et ajuste son harnais de sécurité. « Et on se pose où ? » demande la jeune femme. « Dans le camping du Shérif ? J'espère bien qu'il y a eau chaude à volonté et lit confortable ! »


 

- et bien... » répond Horst « pas tout à fait. En fait, on en est à 200 km. Une bête panne de la centrale inertielle. »


 

- et donc ?... » s’inquiète Sidonie en fronçant sa ligne de sourcils et en changeant de ton. Avant que Horst ne réponde, Gena l'interrompt en lui désignant un point au sol « Là ! De la lumière ! ». L'engin vire de bord et cercle autour de la lueur. Un feu de camp rougeoyant dans la pénombre du soir qui tombe, pas très visible sous les arbres épais de la forêt qui s'étend à perte de vue. « On n'a pas trop le choix. » poursuit Gena « C'est le seul signe de vie à l'horizon. Je cherche une clairière pas trop loin. »


 

Tandis que Horst explique à ses passagers que, faute d'énergie et par suite de la panne des instruments de navigation, le groupe est contraint de se poser loin de toute construction, dans la forêt près du Grand Lac de la Mer des algues, Gena amène doucement l'antigrav au sol, sans heurt.


 

- N'importe quoi ! » maugrée Sidonie en suivant le groupe hors de l'antigrav, dans la petite clairière, sous le ciel étoilé et frais. « C'est bien pour ne pas rester seule que je marche avec vous, mais ça va se payer. Quelqu'un va payer. » La suite de son monologue se perd dans la brise du soir mais Horst, Gena et Moïse n'ont aucun doute sur l'état d'esprit de celle qu'ils sont supposer protéger et amener à bon port. Elle n'est pas contente. Pas du tout.


 

Et c'est ainsi que le groupe se met en marche, à la boussole, vers le feu de camp aperçu du ciel, à travers les arbres, sur un sol accidenté sans sentier tracé. Gena et Horst sont équipés des lampes tactiques, prélevées sur l'équipement du groupe de recherche d'Armée Privée ©, et sont également armés, porteurs des pistolets, les seules armes que le Shérif Kenton a consenti à les laisser prendre.


 

Dix courtes minutes de progression où personne ne se tord la cheville, Gena devant, lampe éteinte, Horst dix mètres derrière en protection de Moïse et Sidonie, lampe dirigée vers le sol inégal.


 

- ! » Poing levé, Gena bloque la marche puis se coule silencieusement vers son objectif, là d'où Horst sent venir une faible odeur de fumée.


 

Dix nouvelles minutes d'attente puis Gena regagne le groupe. « Personne. Je ne suis pas ranger, mais il y avait là sans doute un groupe d'une quinzaine de personnes qui ont fui à notre approche en emportant tout leur matériel. Je suis quasiment sûre d'avoir entendu du bruit, il ont laissé un ou deux guetteurs » « Donc, soit ils ont peur, soit ils sont hostiles. » dit Horst « Pas de risques inutiles. Le mieux est de revenir au véhicule et toi ou moi on reste à couvert pour les identifier quand ils reviennent. »


 

Et malgré les contestations de Sidonie, Horst, Moïse et la jeune femme font demi-tour, sans lumière cette fois, tandis que Gena disparaît telle une ombre dans la nuit.


 

- AAHHH ! Ouch ! Aille ! » Moïse s'écroule, tombe sur un buisson, roule, lâche force onomatopées et cris de douleurs avant de rester au sol, sur le dos, pleurant. « Oh putain j'ai mal ! J'ai mal ! »


 

- Ligaments arrachés. » conclut Horst. « Tu n'es pas prêt de courir. Pour le reste c'est superficiel. »


 

- Superficiel mon cul ! » rugit Moïse en touchant son visage balafré et sanguinolent. « J'ai failli avoir un œil crevé, je vais garder des cicatrices à vie, je perds des litres de sang et toi ... et toi … Merde, j'en ai marre moi aussi, tien. »


 

Une racine mal placée, un pied qui dérape, une chute sur un buisson aux solides épines et le groupe perdait deux de ses membres. Horst allait devoir porter Moïse jusqu'à l'antigrav et sa trousse de secours.


 

Quinze nouvelles minutes pour refaire le chemin à l'envers. Cinq minutes pour injecter à Moïse les différentes drogues, antidouleurs et autres, contenues dans la trousse de secours, bien équipée heureusement. Horst laisse ensuite le blessé aux mains de Sidonie qui accepte de s'improviser infirmière pour appliquer les pansements liquides cicatriciels sur le visage scarifié.


 

Horst prend ensuite position à l'extérieur de l'engin, dissimulé à l'orée de la clairière, arme en main, et attend. Attend.


 

Au sol, allongée dans un épais fourré, arme au poing, Gena attend. Attend.


 

Et voit revenir vers le feu de camp, lentement, presque silencieusement, un jeune homme. Pas d'arme, pas d'équipement particulier, mais une sorte de tenue d'uniforme ornée d'un foulard bleu noué autour du cou.


 

Un autre apparaît, de l'autre côté. Un peu plus jeune, même tenue, toujours sans arme ni équipement particulier.


 

Enfin un troisième, encore plus jeune, « à peine quinze ans » pense Gena, interrogative.


 

Encore dix minutes d'aller et retour, et ce sont quatorze ados que dénombre Gena. « Treize à dix-huit ans » estime-t-elle. « Des scouts. » conclut-elle, incrédule.


 

Elle leur laisse encore quinze minutes durant lesquelles les jeunes gens vont et viennent. Plusieurs ramènent des petits animaux, dépouillés, vidés, embrochés sur des piques de bois qu'ils fixent au dessus des braises. « Fin de cuisson » estime Gena « Ils savent y faire » pense-t-elle, admirative, en constatant leur adresse au couteau, que chacun porte à la ceinture.


 

Par contre, elle ne voit aucun équipement de couchage, et se demande où est le campement, jusqu'au moment où elle en voit plusieurs ramener des feuilles et mousses et en faire des couches. Visiblement, ils campent à la dure et sans adultes, conclut Gena en se disant qu'il est temps pour elle de se montrer.


 

- Bonsoir ! » Les ados bondissent sur leurs pieds, les couteaux sortent, tous les visages se tournent vers celle qui vient d'apparaître derrière un arbre. Mains vides et écartées, Gena essaie de ne pas paraître menaçante, mais le pistolet est visible à sa ceinture. « Je ne viens pas en ennemie. Je fais partie d'un petit groupe et nous sommes posés pas très loin. Je m'appelle Gena. Je peux m'approcher ? »


 

Les jeunes se regardent entre eux, puis après quelques hochements de tête l'un des plus âgés prend la parole.


 

- Bonsoir Gena. Je m'appelle Zack. Nous sommes un groupe d'éclaireurs de la 12eme Pastorale de l'Eglise du 8eme Jour. Vous avez faim ? » termine-t-il en désignant le feu où rôtissent encore quelques petits animaux.


 

Tout en grignotant ce qui ressemble à un lapin, tout en gardant un œil sur les jeunes, Gena discute avec Zack puis avec d'autres. Elle apprend que les ados faisaient leur grande rando annuelle avec les prêtres de la pastorale mais qu'un pont s'est effondré, séparant les jeunes des adultes et leur faisant perdre leur équipement. Ceci se passait il y a trois jours et depuis le groupe essaie tant bien que mal de regagner l'endroit où ils espèrent retrouver leurs accompagnateurs.


 

En elle-même, Gena est persuadée que les jeunes mentent. Trop d'incohérences dans l'histoire. Mais pour le moment elle fera comme si elle les croyait. De son côté, elle se contente de leur dire que son groupe à elle a subi une panne d'antigrav et qu'elle pensait chercher de l'aide auprès de ceux qui avaient allumé ce feu à peine visible du ciel. Gena note que les ados n'ont pas l'air très heureux d'apprendre que leur campement était ainsi repérable. « Ils se cachent. » pense-t-elle. « De qui, de quoi, il faudra l'apprendre assez vite. »


 

Et donc, au bout d'une vingtaine de minute, Gena reprend le chemin de l'antigrav, accompagné de trois ados, Zack, Jon et Bastié.


 

- Psst ! » lance-t-elle en abordant la clairière. « C'est Gena, tout va bien. Ne tirez pas. »


 

Pas de réaction. Pas de bruit. Pourtant l'antigrav est éclairé et ouvert. Très doucement, Gena se coule jusqu'à la porte et découvre Moïse endormi et Sidonie allongée, les yeux fermés et les oreilles entourées d'un casque. « Ohé, du bateau ! » clame-t-elle bien fort en pénétrant à l'intérieur, suivi des ados.


 

Deux minutes passent, le temps que Moïse se réveille et que Sidonie daigne s'intéresser à la nouvelle situation.


 

- Merde ! Moïse ? Qu'est-ce qui t'es arrivé ? » souffle Gena en constatant les blessures sur le visage de son compagnon. Celui-ci bredouille quelques mots sur une chute dans la forêt, quand une voix dure se fait entendre depuis l'accès de l'antigrav, dans le dos de Gena et des ados.


 

- Ami ou ennemi ? » prononce distinctement Horst, arme fermement pointée sur les jeunes qui lèvent les mains en l'air par réflexe. C'est vrai que l'ancien soldat n'a pas l'air commode.


 

- Relax, Horst. » dit Gena. « Ces jeunes gens sont perdus en forêt et ils n'ont pas d'autres armes que leurs couteaux d'éclaireurs. On s'assied et on parle ? »


 

Les trois jeunes profitent bientôt des réserves d'eau et de Kaoua instantané de l'antigrav et racontent à nouveau ce qu'ils ont expliqué à Gena. Les questions permettent de comprendre que les ados sont tous issus de milieux aisés, voire très aisés. La preuve, Sidonie connaît les familles de Zack et de Jon. L'Eglise du 8eme Jour recrute dans les classes supérieures.

Horst et elle échangent quelques regards, chacun pense que les jeunes dissimulent quelque chose. Mais lorsque Moïse et Sidonie se présentent, Jon prend la parole.


 

- Euh... Excusez-moi. Vous êtes vraiment Sidonie Tsilton ? Celle de Corp One ? » L'oeil de l'intéressée s'allume. Enfin quelqu'un qui la reconnaît, ça la remet un peu dans sa vraie vie, celle dont elle est la vedette. Le gamin a l'air soufflé, lui et ses copains se regardent comme si le messie était entré dans leur vie.


 

- Excusez-moi d'interrompre un moment si charmant, » dit Gena, « mais il faudrait se décider sur la suite des événement. Vous êtes des gentils garçons, vous n'avez pas d'endroit où dormir, mais nous non plus on n'a pas de place pour 15. On peut vous dépanner en Kaoua et vous donner quelques rations, mais vous non plus vous ne pouvez pas réparer notre engin. Par contre vous savez où aller. Je crois qu'on est tous partis pour deux jours de marche commune. Horst ? Moïse


 

Moïse éclate d'un rire sinistre en montrant sa cheville. « Avant de me ruiner le visage, je me suis détruit la cheville, Gena. Hors de question de marcher plus de trois mètres. Tu as une autre idée ? »


 

Comme personne n'a vraiment d'idées pour le moment, Gena décide de retourner avec Bastié vers le campement des éclaireurs, qu'ils vont ramener. Autant rassembler tout le monde, offrir une boisson chaude aux ados, les plus jeunes pourront au moins dormir dans le véhicule, Horst et Gena dormiront dehors, dans les sacs de couchage d'Armée Privée ©.


 

Puis, tandis que Moïse retombe dans un sommeil réparateur, Horst reprend sa position de guet à l'extérieur et Zack, Jon et Sidonie s'installent non loin, et comment à parler des people que chacun connaît.


 

C'est au bout d'une trentaine de minutes que Horst se lève et, silencieusement, invisible, parvient jusqu'à l'endroit d'où émanaient les sons caractéristiques d'une activité humaine aussi ancienne que l'homme et la femme. Et, oui, sous la lune, sur la mousse, trois corps enchevêtrés s'adonnent au stupre et à la luxure. Deux jeunes hommes, une femme. Ils ont l'air tous trois parfaitement consentants.


 

Horst se retire aussi discrètement, se promettant d'en parler sérieusement avec Sidonie au matin. Mais aussi avec Gena, à propos des marques indéniables de fouet qu'il a clairement vues sur les dos de Zack et Jon...


 

Commentaires

Par Bardablog le 19/11/2011 à 11:57

La suite...! On ne s'en lasse pas...

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